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Labyrinthes de Franck Thilliez

Whooz : Franck Thilliez
ON : Labyrinthes – Fleuve Noir, 2022

Labyrinthes de Franck Thilliez

Chronique de Bruno Delaroque

Mai 2022 marque le retour de Franck Thilliez sous les feux de la rampe. Fortement attendu, on se demande bien ce que ce surdoué va nous réserver.

Avec ce nouveau grand format et la sortie simultanée du précédent en poche (« 1991 » chez Pocket), Franck Thilliez est au cœur d'une grosse actualité d'autant plus que le dernier trimestre de cette année verra la diffusion sur TF1 de son adaptation du Syndrome « E ». Sharko (Vincent Elbaz) et Lucie Hennebelle (Jennifer Decker) en chair et en os ; croyez-moi , cela va être quelque chose. J'ai assisté à la projection en avant-première !

Mais revenons à « Labyrinthes » ; un one shot comme il aime nous en proposer une fois sur deux.

Première scène dans un hôpital avec une blessée grave complètement amnésique. L'enquêtrice Camille Nijinski est reçue par le Docteur Fibonacci qui va lui raconter une drôle d'histoire. Celle de cinq protagonistes ; toutes des femmes. « La journaliste », « la psychiatre », « la kidnappée », « la romancièe», quant à la cinquième......

Début d'histoire peu commune, avec un suspense au compte-goutte et une plume précise comme d'habitude. On sait déjà que Franck Thilliez nous embrouille et va nous embrouiller ; on en est certain parce que c'est sa grande spécialité...Et encore, si vous saviez à quel point !

Rythme plus lent cette fois pour nous raconter cette extraordinaire histoire à partir de gens et d'endroits différents. Faux tempo, faux-semblants, toujours est-il que le scénario se met en place et le pauvre lecteur que je suis, bon client de l'auteur se retrouve à nager en plein brouillard.

Dans ce titre dédaléen, on retrouve les thèmes chers à l'auteur comme les vieux films et pellicules (Syndrome E) ; les problèmes de fonctionnement du cerveau et ses multiples mystères (La mémoire fantôme, Puzzle, Rêver, Il était deux fois), la captivité (Vertige, Luca et tant d'autres) et le jeu d'échec véritable marqueur de la puissance de l’esprit. Mise en abyme permanente comme bien souvent et thème de l’hyper-électrosensibilité, c’est un nouveau terrain de jeu à explorer ; Thilliez étonne, détonne, bétonne et laisse son lecteur atone avec un scénario assez fou.

Avec ce roman plein de surprises, c'est vers « Le Manuscrit inachevé » et « Il était deux fois » qu'il faut lorgner, car si ce livre se lit indépendamment, il se pourrait bien que Franck Thilliez se serve d'une large palette pour doper l'histoire et nous suggérer une vision globale de son œuvre. C'est remarquable, passionnant et malgré la brume qui va envahir vos neurones à la lecture, c'est assez stupéfiant.

Je n'ai jamais connu avec cet auteur un tel début de roman. En 90 pages, il lâche par petites touches des twists qui interpellent et interrogent. Des petits cailloux laissés ici et là en chemin à l'attention du lecteur qui essaie de ne pas se noyer. Le puzzle semble avoir du mal à s'imbriquer, d'autant plus qu'à chaque porte que l'on croit fermer, une autre s'ouvre !

On retrouve avec une redoutable efficacité le mécanisme de la peur viscérale, celle qui vous faire perdre pied et tout espoir. C'est un cocktail subtil qui risque de perturber le lecteur.

Jeu du chat et de la souris, mais qui est le ou la chassée ? J'ai eu l'impression de retrouver un peu ce vieux film de John Carpenter, « L'antre de la folie » (1994) avec Sam Neil et Jürgen Prochnow ou il était question d'un enquêteur et d'un écrivain disparu.

Le maître du temps, des illusions, de la mémoire et de ses labyrinthes insondables, c'est bien Franck Thilliez. Ce scénario hallucinant a dû lui donner du fil à retordre comme jamais et lui occasionner quelques nuits blanches. Peut-être même qu'il s'y est perdu à un moment ou un autre ?

Mais ne comptez pas sur moi pour vous en livrer davantage. J'ai été surpris par cette construction du scénario qui ne ressemble à aucun autre. Je me suis trituré les méninges pendant toute ma lecture pour essayer de comprendre ; oui mais, comprendre quoi ?

Dans ce 21ème opus, l'auteur joue avec nos nerfs et ceux de ses personnages principaux. Il envoie du lourd avec une histoire hors norme, où les engrenages sont huilés à la perfection. C’est une mécanique de précision digne de la meilleure des horlogeries suisses.

J'ai été perturbé et quelquefois perdu dans ce livre à tel point que je n'ai pas vu venir la claque que j'allais me prendre.

Phénoménal dans sa réalisation et hitchcockien, je ne suis pas sûr qu'un grand enquêteur belge aux cellules grises forts actives ne se serait pas fait avoir aussi. J'ai refermé ce livre en m'esclaffant : « Mais ce n’est pas possible » ! Car oui, après être passé par tous les états, j'étais fou à la fin de ce livre de voir comment l'auteur m'avait mystifié et parce que, oui, tout s’explique ! Un seul mot s'impose : « BRAVO ».

Le coup de cœur Whoozonien s'impose évidemment ; comment pourrait-il en être autrement après un tel récit. « Labyrinthes » fera date et ne sera pas loin de devenir une référence du genre ; un classique, j'en suis persuadé.

Et n’oubliez jamais cette citation d’Arthur Conan Doyle que l’auteur cite en préambule : « Lorsque vous avez éliminé l’impossible, ce qui reste, si improbable soit-il, est nécessairement la vérité ».

Je remercie les éditions Fleuve pour leur fidélité et Monsieur Franck Thilliez pour ce grand bonheur de lecture qu'il nous offre chaque fois.

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