Le gibier de Nicolas Lebel
Whooz : Nicolas lebel
ON : Le gibier – Le Masque, 2021
Le gibier
de Nicolas Lebel
Chronique de Bruno Delaroque
Avec « Le Gibier », on s'attend forcément à une chasse, à une proie que l'on traque. Et pourtant cinq chapitres plus tard, on nage en plein mystère et on s'interroge. L'auteur présente ses personnages, passe de l'un à l'autre et on se demande où il veut en venir. Patience !
Je vous rassure tout de suite, on a quand même un commissaire, Paul Starski en pleine tourmente dans son couple et très inquiet avec son chien adoré, Albus, gravement malade. Et puis, on a une prise d'otages à proximité de la clinique vétérinaire, dans un appartement parisien.
Ah j'oubliais, on a deux cadavres aussi, pas mal pour un début, non ?
Bien chaud tout ça pour notre ami le policier flanqué de sa fidèle lieutenante Yvonne Chen. L'un et l'autre aborde la vie et leur métier de façon bien différente. Chacun a ses problèmes, mais pas au même niveau. Il suffit malgré tout de peu de choses pour déstabiliser un univers bien réglé.
Juste le temps pour notre romancier de philosopher sur notre monde sans concession ; soit on est soumis et on ramasse les miettes, soit on est dominant et on se gave ; que la mécanique se met en branle et que les pièces du puzzle jusqu'alors dispersées se mettent en place. On constate que l'écrivain a monté un piège diabolique ; et encore à cet instant précis, j'étais loin d'imaginer la suite des événements.
Tout s'accélère et nos enquêteurs commencent à comprendre dans quelle partie de chasse (à courre) ils sont embarqués. A coup de cors de chasse et de corps morts, de leurres et d’appâts, Nicolas Lebel nous régale avec un scénario bien huilé et mortel. La traque du Gibier est comme une course folle où tout est réglé, millimétré et où nos flics sont toujours à la traîne, dépassés par les événements. Dans cette chasse à courre dangereuse, ce sont eux qui courent derrière. Derrière quoi d'ailleurs, on ne le sait toujours pas à mi roman. Le Gibier semble identifié, mais tout ce qui tourne est nébuleux tant au niveau du mobile que des tenants et aboutissants. On se demande s'il va y avoir mise à mort, ou plutôt quand et comment, puisque depuis le début , ça tombe comme des mouches.
Vocabulaire approprié et techniques de chasse donnent au récit puissance et un certain panache. On se rapproche d'un univers à la Jean Christophe Grangé et ça c'est que du bonheur.
Comme avec la famille Morvan dans « Lontano » de Grangé, les réponses de la famille De Talense pourraient bien se trouver en Afrique. L'Afrique est depuis longtemps le terrain de jeux préféré des nations puissantes et des multinationales pour toutes sortes d'exploitations, de recherches et d'avilissements. Ce n'est hélas pas de la fake news.
Mais , chut je ne vous en dirais pas plus, parce qu'il faut que vous découvriez absolument par vous même ce que l'auteur nous a réservé.
N'oublions pas que nous sommes en 2021 et qu'avec cette drôle de période, pas drôle du tout, que nous subissons depuis un moment, ce dernier Nicolas Lebel prend une saveur particulière. Bien plus qu'un simple thriller à mon avis, et bien plus qu'une chasse , ce « Gibier » n'en finit pas de livrer des surprises et s'annonce extrêmement séduisant. C'est bien plus qu'un polar et en y réfléchissant un peu, on aura assez vite de vraies questions à se poser.
Jamais classiques et jamais dénués de sens profond, les histoires que racontent Nicolas Lebel sont toujours bien ficelées et il me semble qu'ici, avec ce dernier opus, il va en boucher un coin à plus d'un !
Ne passez pas à coté de cette petite merveille et ouvrez grand vos yeux et vos oreilles dès le départ, parce que comme moi, vous allez vous faire avoir.
Ce bouquin est diabolique tout simplement. En abandonnant notre Mehrlicht préféré, il aurait pu décevoir un peu ses fans et c'est tout le contraire qui se passe. Je pense que c'est son meilleur à ce jour, et dieu sait qu'il y en a eu de forts bons.
Encore un gros coup de cœur pour Nicolas lebel et son « Gibier » ; gibier à accompagner d'un excellent « Saint Joseph », ce n'est pas l'auteur qui me contredira !
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