
La Métamorphose de Pascal Martin

Whooz : Pascal Martin
ON : La Métamorphose – Jigal Polar, 2019
La Métamorphose de Pascal Martin
Chronique de Bruno D
J'ai vraiment envie de féliciter l'auteur de « La Métamorphose » (Jigal, 2019) dès le début de ma chronique parce que j'ai passé, une fois de plus, un excellent moment de lecture en sa compagnie.
Pascal Martin, puisque c'est de lui qu'il s'agit, je l'avais découvert avec « La Reine noire » (Jigal, 2017), puis « L’affaire Perceval » (Jigal, 2019). Dans ce livre III du monde selon Cobus « La Métamorphose », on tourne les pages sans avoir envie de s'arrêter et ne pas avoir lu les deux premiers tomes n'est pas handicapant du tout.
Cobus est un ex trader déchu. Passé de la lumière à l'ombre, il connaît, il a donné, et de galères en galères en passant par la case de Fleury-Mérogis, il entrevoit enfin le bout du tunnel après avoir transformé le squat dans lequel il vit en entreprise de fast-food branchouille et haut de gamme : « Le Monde de Juju ». Une belle revanche sur la vie en utilisant les compétences des mamas africaines du squat et en faisant affluer des capitaux grâce à son ancien réseau de trader. Le problème c'est qu'un incendie douteux va ravager le squat et emporter avec lui la cuisinière qui portait le projet à bout de spatules et de gamelles.
A partir de là, ça se complique sérieusement pour notre ami Cobus qui va devoir faire face à bien des aléas et forces obscures.
« La Métamorphose » est un bouquin à la fois très simple et fort complexe. On y découvre un Cobus qui n'est pas un Saint, mais également un battant, sympathique et animé d'une volonté à toute épreuve ainsi que des personnages hauts en couleurs, voyous gros bras ou délinquants financiers en cols blancs ou même politiques qui suivent le sens du vent. Pascal Martin propose ainsi une foule de personnages crédibles.
Dans cette fiction bien plus proche d'une réalité nauséabonde que du monde des bisounours, il nous emmène dans un univers à la fois feutré et violent des tractations souterraines que l'on utilise pour acquérir un lopin de terre ou un immeuble. C'est pas jojo et c'est drôlement bien réalisé. Pressions, fric et magouilles en tout genre, en veux tu ? … En voilà !
« La sécu pour des sans papiers, c'est comme un maillot de bain pour des esquimaux » ; ça c'est juste pour vous donner une idée du style de l'auteur. Entre humour et gravité, le récit est truffé de bons mots et de phrases chocs. Du petit lait à déguster sans modération parce que c'est bon et même très bon. Pascal Martin n'a pas son pareil pour décrire la misère humaine, la détresse sociale, le tout avec aménité et dérision. Dès le départ son talent opère, et son immersion profonde dans les arcanes de la misère, des sans papiers, des laisser pour compte nous accroche et nous laisse assez effarés.
Tout cela sent le vécu d'un auteur maîtrisant parfaitement les codes de son sujet. Les mots sont justes, les chapitres bien construits et le rythme adapté. On ne s'ennuie pas un seul instant et on découvre un pur roman noir oscillant entre violence, optimisme et roublardise. Le microcosme de la société est passé au révélateur de Pascal Martin et c'est délicieux par moment.
Décapant, corrosif, sarcastique et pourtant particulièrement humaniste et optimiste, ce dernier opus de Pascal Martin se déguste avec gourmandise comme un plat du Monde de Juju. La cuisine est un art, l'écriture aussi, et je ne doute pas un seul instant que beaucoup d'auteurs de noir que je connais auraient aimé écrire ce genre d'histoire. Merci à Pascal Martin et à la maison Jigal pour nous offrir une fois de plus une savoureuse perle noire.
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