A la découverte des Editions Ring
Whooz : Les éditions Ring
ON : 2017
A la découverte des éditions Ring
Rencontre avec Anne-Sophie Martin, Ghislain Gilberti et Laurent Obertone
« Ring, c’est l’édition de demain », Ghislain Gilberti
Ring est une toute jeune structure souvent jugée comme « sulfureuse ». Il est vrai que la plupart de ses auteurs sont loin de susciter l’indifférence ! « Humeurs Noires », jeune librairie lilloise, a reçu trois d’entre eux. Des plus représentatifs, dirons-nous : Anne-Sophie Martin, Ghislain Gilberti et Laurent Obertone. Le mot d’ordre du jour fut donné par Olivier Vanderbecq, libraire de la librairie Humeurs Noires de Lille et animateur/modérateur de la rencontre : « On va essayer de ne pas polémiquer sur ce qui fait polémique ». Dont acte, la rencontre du « Corbac » (surnom d’Olivier Vanderbecq) aborda les ouvrages de ses différents invités – et leurs seuls ouvrages – avant de faire connaissance avec la structure proprement dite, les éditions Ring.
Vifs remerciements à Laura M. et Bruno D.
Galerie exclusive.
La rencontre
Présentation des forces en présence
Anne-Sophie Martin, Ghislain Gilberti et Laurent Obertone sont édités par Ring en représentant trois styles différents. Leur point commun (relevé par Ghislain Gilberti) étant leur implication et leur volonté de raconter la société.
Ghislain Gilberti est l’auteur de trois livres de fictions purs et durs sortis chez Anne Carrière, ses premiers et derniers opus sont sortis en poche, le second devrait sortir sous peu en ce format. Le quatrième et dernier livre de Ghislain Gilberti (édité par Ring) est en partie autobiographique.
Ghislain Gilberti : Je suis un auteur publié depuis 2013 chez Anne Carrière, et depuis peu chez Ring. Mes polars sont des fictions très documentées et le plus réaliste possible. Mon premier livre a eu du mal à être édité, il vient de sortir chez Ring. Seuls trois éditeurs se sont intéressés à moi quand j’ai voulu être édité : Albin Michel, le Cherche Midi et Anne Carrière. J’ai refusé d’être édité par Albin Michel et ai choisi Anne Carrière car son éditeur, Alain Carrière, a réellement été intéressé par mes écrits. Il m’a encouragé, et m’a mis en confiance. Dynamique du Chaos, mon dernier livre est lui sorti chez Ring, après un long parcours.
Avec Le Disparu (Ring, 2016) Anne-Sophie Martin est l’auteur d’un travail autant documentaire ou d’investigations journalistiques que de fiction. Elle y décrit un an de la vie de Xavier Dupont de Ligonnès avant les événements que l’on connait.
Anne-Sophie Martin : Je suis d’origine normande, née au pied de la centrale de La Hague – et donc gauchiste très jeune ! J’habite à Paris depuis 1984. J’ai fait des études de lettres, une école de journalisme. Assez rapidement je me suis spécialisée dans les affaires criminelles, essentiellement les procès. Je fais de la télévision depuis 10 ans. J’ai écrit des bouquins de journaliste, des enquêtes, des récits. Je suis passée au roman avec mon dernier livre sur l’affaire Dupont de Ligonnès pour raconter une histoire plutôt qu’une enquête. Avec la volonté d’aborder le côté psychologique des personnages. C’est ma vision de l’affaire. Ma lecture étant que Xavier Dupont de Ligonnès soit toujours vivant.
Laurent Obertone a, lui, écrit des essais à partir d’un travail journalistique sur la société avant d’aborder le genre romanesque avec son dernier ouvrage : Guerilla.
Laurent Obertone : Je suis né en 1984. J’ai une formation d’historien, d’anthropologue et de journaliste. En tant que journaliste je me suis intéressé aux affaires criminelles en suivant des procès en tribunaux. J’ai écrit un essai sur l’insécurité en France : La France Orange Mécanique qui m’a fait connaître et apporté tout un tas de désagréments – je ne regrette rien ! J’ai écrit La France Big Brother, une enquête sur les médias, le livre conséquences du premier. Je suis également l’auteur d’une enquête sur Anders Behring Breivik, un roman en immersion dans la tête du tueur avec une restitution des événements minute par minute en multipliant les points de vus. Un livre éprouvant. Guérilla raconte les possibles embrassements urbains à partir de scénarios terroristes et d’embrassements urbains. Une pure fiction, à partir d’un travail très documenté s’appuyant sur les retours du renseignement français (un livre d’anticipation selon Ghislain Gilberti).
Les ouvrages
Ghislain Gilberti - Dynamique du Chaos
Ghislain Gilberti : Je ne dirais pas que Dynamique du Chaos est plus important pour moi que mes autres livres, il est juste plus intime. Mon dernier livre paru est à 99 % autobiographique. J’y ai fait quelques distorsions pour ne pas gêner certaines personnes et pour ne pas avoir de problèmes judiciaires sur ce que je dévoile. « La dynamique » est une analyse sociétale sur fond d’un sociopathe qui est en décrochage de l’héroïne et qui a une insertion quasiment impossible dans la société. A travers ce filtre on voit le monde d’une manière différente et on vit une histoire d’amour impossible qui revient hanter le narrateur. « La dynamique » est, en termes de date, mon premier bouquin, c’est un livre que j’ai écrit en 2004. Dynamique du Chaos est un livre qui n’a pas tenté les éditeurs (frileux !), même remanié, allégé. J’ai distribué ce livre gratuitement sur internet en 2007. Il m’a complètement échappé, avec quelques 100 000 lecteurs sur un seul site, une plateforme belge. A la base, Dynamique du Chaos » est plus proche de mes goûts littéraires (Bukowski, Kerouac … Artaud). Je ne connaissais pas le monde du polar. Ce n’est pas mon domaine de prédilection ! J’ai eu envie de m’essayer au policier, sans formation. Tous mes livres sont des polars.
Pour Dynamique, j’ai pris deux ans de documentation. J’ai demandé de l’aide à la police (au CRVP), qui après observation de mon casier n’a pas répondu favorablement à ma demande ! Suite à mon premier livre et son succès relatif, la police m’a ouvert ses portes car ils ont vu que je n’écrivais pas à charge contre eux. Mes flics sont des héros. Ils m’ont ouvert les portes de la CSI, la Compagnie de Surveillance et d’Intervention qui s’occupe à la fois de surveiller les manifestations du haut des toits et de l’entretien des catacombes et des carrières de Paris. J’ai donc visité des catacombes que personne n’a le droit de visiter.
Si l’on regarde ma trilogie sortie chez Anne Carrière, on s’aperçoit que mon écriture a changé. Mon premier tome possédait trop de descriptions. Mes deux suivants sont moins descriptifs. Au fil du temps j’ai gagné en fluidité. Ce qui ne s’imposait pas pour Dynamique du Chaos que j’ai écrit au présent de narration, au passé composé et à l’imparfait. Au final mon livre se lit d’une manière fluide. Pour Ring, j’ai revu légèrement mon ouvrage (surtout dans le style). Il correspond à ce que j’avais écrit initialement.
Un projet ! Il sortira en sept/oct prochain. Ce sera ma version d’ « Alice au pays des merveilles » ! Chez Ring.
Anne-Sophie Martin - Le Disparu
Anne-Sophie Martin : Mon livre est une fiction basée sur des faits réels. Journaliste, il représente pour moi un saut dans l’inconnu. J’ai toujours aimé les exercices de style. Je vois le journalisme comme une figure de style. Faire des récits avec décors et descriptions. J’ai pris mon livre comme un jeu d’écriture en me faisant violence. Le reportage possède une écriture très codée avec une accroche, des paragraphes qui te font progresser, etc. On relaie l’opinion des autres ! Avec Le Disparu, j’ai appris à donner mon avis. J’ai écrit sur un personnage avec l’impression de l’avoir près de moi, de le connaître comme si je le connaissais vraiment. Ses copains et ses proches m’ont dit « c’est dingue, on dirait que vous êtes allé à l’école avec lui ! ».
Ça fait 25 ans que je suis journaliste, il m’a été difficile de passer à la fiction. Je n’ai pas connu la peur de la page blanche. Le Disparu m’a demandé un travail de réécriture. J’ai fait de la fiction du réel en partant d’un travail de recherche. J’ai retrouvé des éléments datant d’un an avant le fait divers. Ma marge narrative est composée de ses écrits personnels. Je reconstitue sa dernière année en me servant d’écrits plus anciens mais dans des événements datant de cette année-là. Ma construction devient une fiction à partir d’écrits authentiques. J’écris l’histoire d’un mec qui a écrit le scénario de ce qu’il allait faire. Il a écrit un synopsis que j’ai interprété ! Le Disparu a des scènes totalement inventées même si elles restituent un truc proche de la réalité. Moi-même je ne savais plus trop quand j’étais dans le réel et quand j’étais dans la fiction ! Mes lecteurs ne savent pas non plus quels sont les éléments que j’ai inventés et quelle est la réalité, et ce ne les a pas gênés. Le personnage est fascinant, on cherche plus des éléments et infos qu’une cohérence par rapport à la réalité. Mon œuvre est une fiction documentaire ! Les lecteurs peuvent le lire comme un document, même s’il s’agit d’une fiction ! Mon livre comporte pas mal de récit, mais la fiction me permettait, par rapport à une enquête, de ne pas citer de source.
Encore une fois, mes réflexes de journaliste ont été difficiles pour moi à surmonter. Mais j’ai eu énormément de plaisir à l’écrire.
Laurent Obertone – Guerilla
Laurent Obertone : Je cherche « la structure absolue », le meilleur outil de communication sur l’époque. Après les essais, j’ai choisi de passer au roman avec Guerilla. Je veux voir lequel des deux genres intéresse le plus, et je suis un peu embêté car c’est à peu près pareil, ce qui fait que je ne sais pas ce que je vais faire ! On est bien plus focalisé sur le geste littéraire alors que sur l’essai on est basé sur le chiffre, la statistique, les faits, l’exactitude de la méthode. Ce qui est différent, mais en tout cas mes lecteurs m’ont suivi.
Mon passage à la fiction s’est fait avec Utøya, mon livre sur Anders Behring Breivik, un livre qui passait du factuel et du récit. Il fallait mettre les faits en scène.
Je n’arrive pas à choisir entre continuer l’écriture sous forme d’essai ou sous forme de fiction. J’aimerais que ce soit net car il reste beaucoup de choses à dire sur l’époque ! Que ce soit avec un essai ou une fiction je parle de la même chose, c’est-à-dire de la société, des médias, tout ce qui occupe l’actualité tous les jours. Mes essais possèdent une continuité évidente sur la vision de la société, mes articles sont différents car fait pour un employeur de la presse d’information locale (donc pas d’ « opinion »), ce travail d’information est purement factuel, mes essais ont un point de vue plus subjectifs que l’on retrouve dans mes romans.
Ring, qu’est-ce que c’est ?
Ghislain Gilberti : C’est une maison d’édition très novatrice qui a aujourd’hui 4 ans ! Ses idées, notamment celle de faire des trailers sur le net ont déjà été recopiées. Ring est une maison imitée sans jamais être égalée.
Laurent Obertone : Le monde de l’édition est stagnant et est composé de machines de guerre, Ring est arrivé avec quasiment un gars tout seul, David Serra, faisant des trucs très novateurs et qui cartonnent, cela a créé instantanément une énorme jalousie. Et David Serra n’est pas l’ami d’amis du milieu !
Anne-Sophie Martin : Le milieu de l’édition a critiqué fortement les éditions Les Arènes qui ont réussi un coup en publiant Merci pour ce moment de Valérie Trierweiler. Ils furent victime d’une énorme campagne qui fut calmée par le volume des ventes. David n’est pas du sérail, il est fort critiqué, mais c’est du procès d’intention.
Laurent Obertone : On ne peut rien dire de notre catalogue ! On se sert de moi pour salir la réputation des autres auteurs. Ring édite des auteurs aussi divers que Matthias Köping, Zineb El Razhoui, Frédéric Ploquin ou Stéphane Bourgoin.
Anne-Sophie Martin : David a complètement intégré d’être tricard dans le milieu ! Un milieu qui dézingue d’une manière stérile. Je ne suis pas pour les procès politiques en permanence.
Ghislain Gilberti : Seul l’avenir dira que David Serra a raison. Un phénomène comme Ring ne pourra pas rester ignoré. On ne pourra pas continuer à le calomnier bêtement. Au bout d’un moment il faudra se rendre à l’évidence, Ring est la maison d’un homme qui a eu une idée, un concept, qui a révolutionné le monde de l’édition, quoi qu’il arrive. Ring sera copié, et on va se faire à Ring. David a su utiliser les médias et les images pour faire revenir les gens à la lecture. Il existe beaucoup de gros lecteurs, mais de moins en moins de gens lisent. David redonne l’envie de lire à certaines personnes. Il ramène des gens à la lecture. Le phénomène de rejet de Ring ne durera pas. Il ne durera pas car c’est une structure qui va continuer à se développer.
« Ring » c’est l’édition de demain.
Laura Magné (directrice du service de presse, éditrice) : Ring est composée d’une équipe réduite, un vidéaste, un attaché de presse et un community manager, de David Serra et de moi-même.
Je ne suis pas devin, mais « Ring » a pris beaucoup d’ampleur ces derniers mois. La venue de Marsault n’y est pas pour rien, nous avons également beaucoup innové dans le milieu de l’édition qui était très terne, très « politiquement correct ». Ring est vu comme une maison assez politiquement incorrecte mais en même temps les gens en ont peut être assez de ce politiquement correct et veulent quelque chose qui leur ressemble. On a beaucoup de lecteurs (marqués à droite, comme à gauche) qui en ont marre de la télévision et de ce qu’on leur sert au quotidien et qui se sont tournés vers d’autres médias dont Ring qui est vu aujourd’hui non plus comme une simple maison d’édition mais comme une plateforme médiatique à part entière. Ring qui compte des auteurs marqués à gauche, comme Ghislain, ou d’autre comme Laurent ou Geoffroy Lejeune, directeur de la rédaction de Valeurs Actuelles, qui sont marqués à droite. 99 % de nos auteurs sont des auteurs de gauche, seuls Geoffroy et Laurent réunissent un lectorat clairement marqué à droite, c’est peu pour nous tomber dessus à la moindre occasion… Nos lecteurs achètent à la fois Ghislain et Laurent, les bords politiques des uns et des autres - quand ils en ont -, importe peu.
Ring un jour sera à la mode, c’est évident.
Il y a une espèce de communauté Ring qui s’est mise en place sur les réseaux depuis quelques mois. Cette communauté achète nos ouvrages certes par soutien et par goût de ce politiquement incorrect, mais avant tout parce que nos auteurs et le contenu des ouvrages sont excellents. Quand on sort un ouvrage qui met Zemmour à la présidence c’est de la provocation, on sait qu’on va s’en prendre plein les dents mais beaucoup oublient de souligner la qualité d’écriture et le réalisme d’un tel livre. On a une étiquette qui nous est collée sur le front mais beaucoup savent que nous sommes en partie dans la provocation, mais certainement pas dans l’idéologie.
Les éditions RING sur WHOOZONE.COM
A la découverte des éditions Ring
Rencontre avec Anne-Sophie Martin, Ghislain Gilberti et Laurent Obertone
Le festin du serpent de Ghislain Gilberti
Sa majesté des ombres de Ghislain Gilberti
Chroniqué par Bruno D
Chroniqué par Bruno D
Pour aller plus loin
.